
[Actu #61] L’actualité BTP de la semaine
News #1 – Un tournant dans la mise en œuvre du ZAN
Le 18 mars 2025, le Sénat a adopté la proposition de loi TRACE (Trajectoire de Réduction de l’Artificialisation Concertée avec les Élus locaux), un texte très attendu visant à adapter la mise en œuvre du Zéro Artificialisation Nette (ZAN) aux réalités des territoires. Cette décision suscite à la fois des espoirs et des critiques, notamment de la part des acteurs de la planification urbaine et de la protection de l’environnement.

Une loi pour concilier développement local et transition écologique
Adoptée à une large majorité, la loi TRACE ambitionne de mieux prendre en compte les besoins des collectivités territoriales dans la trajectoire vers le ZAN. Pour rappel, la loi Climat et Résilience de 2021 fixe un objectif national de réduction de 50 % de l’artificialisation des sols d’ici 2031, avec une neutralité complète en 2050.
Le principal enjeu soulevé par les élus locaux depuis l’entrée en vigueur de cette législation est la difficulté d’adapter les documents d’urbanisme à ces objectifs ambitieux, sans freiner le développement économique et résidentiel de leurs territoires. C’est dans ce contexte que la loi TRACE vient apporter de nouveaux leviers.
Les apports clés de la proposition de loi TRACE
Parmi les mesures phares de la loi TRACE, on peut citer :
- Une plus grande souplesse dans la définition des trajectoires locales de réduction de l’artificialisation.
- L’intégration de projets d’intérêt général dans les enveloppes autorisées d’artificialisation.
- Un calendrier assoupli pour la déclinaison du ZAN dans les documents d’urbanisme locaux, notamment les SCoT (Schémas de Cohérence Territoriale) et les PLUi (Plans Locaux d’Urbanisme intercommunaux).
Selon les sénateurs à l’origine du texte, ces ajustements sont nécessaires pour « éviter une planification trop rigide » et « permettre aux élus de faire coexister ambition écologique et attractivité territoriale ».
Des réactions contrastées chez les acteurs du territoire
Malgré l’approbation au Sénat, la loi TRACE ne fait pas l’unanimité. Dans une tribune publiée le 13 mars sur Batiactu, plusieurs organisations — dont la Fédération nationale des SCoT, la Fédération des parcs naturels régionaux et l’Institut de la transition foncière — appellent les parlementaires à rejeter la proposition. Selon elles, le texte « n’apporte pas de réponse opérationnelle aux besoins des collectivités » et risque d’affaiblir la dynamique de sobriété foncière.
Même son de cloche du côté de France Nature Environnement PACA, qui estime que cette réforme pourrait « ouvrir la porte à un assouplissement excessif » des règles d’urbanisation, au détriment de la biodiversité et des terres agricoles.
Un texte encore en débat
L’adoption par le Sénat constitue une première étape, mais la loi TRACE doit encore passer devant l’Assemblée nationale pour être définitivement entérinée. Des amendements pourraient être proposés, et le texte risque de faire l’objet d’intenses débats dans les semaines à venir.
Ce contexte reflète une tension persistante entre les enjeux environnementaux urgents et la nécessité d’aménagement équilibré des territoires. La réussite du ZAN passera sans doute par une co-construction plus fine entre État, collectivités, experts et citoyens.
Pourquoi cette loi est importante pour les professionnels du BTP et de l’aménagement
La mise en œuvre du ZAN impacte directement les secteurs de la construction, de la promotion immobilière, de l’aménagement du territoire et de la vente de matériaux. Une trajectoire mal définie pourrait freiner l’activité ou créer des incertitudes juridiques pour les projets en cours.
Avec la loi TRACE, les professionnels espèrent une meilleure lisibilité et une plus grande sécurité réglementaire dans leurs opérations. Toutefois, la vigilance reste de mise, car un assouplissement excessif pourrait aussi générer de nouveaux blocages, notamment face aux recours environnementaux.
Source : BATIACTU
News #2 – 229 millions d’euros de fraudes évitées en 2024 pour MaPrimeRénov’
Le gouvernement français a récemment annoncé avoir évité 229 millions d’euros de fraudes liées au dispositif MaPrimeRénov’ au cours de l’année 2024. Cette annonce, faite par Valérie Létard, ministre déléguée chargée du Logement, met en lumière l’intensification des contrôles menés par l’État pour sécuriser les aides publiques dédiées à la rénovation énergétique des logements.

44 000 dossiers frauduleux détectés avant paiement
Selon les chiffres communiqués par l’Agence nationale de l’habitat (Anah), plus de 44 000 dossiers frauduleux ont été identifiés et bloqués avant que les aides financières ne soient versées. Une performance rendue possible grâce au renforcement des mécanismes de détection et de contrôle, mais aussi grâce à une meilleure coordination entre les services de l’État, notamment avec la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes).
Cette action préventive s’inscrit dans une volonté politique claire : garantir une utilisation rigoureuse de l’argent public et protéger les ménages contre les pratiques abusives.
Des contrôles intensifiés en 2025
Face à l’ampleur des tentatives de fraude, le gouvernement prévoit d’intensifier les contrôles en 2025. L’Anah continuera de renforcer ses dispositifs de surveillance, en s’appuyant sur des outils numériques de plus en plus performants. En parallèle, une série de mesures législatives sont à l’étude pour mieux encadrer le rôle des mandataires et durcir les sanctions à l’encontre des fraudeurs.
Parmi les propositions en discussion :
- L’instauration d’une politique de “name and shame”, visant à publier les noms des entreprises condamnées.
- L’extension de l’interdiction du démarchage téléphonique à certains types de travaux.
- Un meilleur encadrement des entreprises mandataires, qui agissent au nom des particuliers pour monter les dossiers d’aide.
Un enjeu central pour la rénovation énergétique
MaPrimeRénov’ est un pilier central de la stratégie de rénovation énergétique du parc immobilier français. Depuis son lancement en 2020, ce dispositif a permis de soutenir plus de 2,5 millions de projets de rénovation, en facilitant l’accès aux aides pour les ménages modestes comme pour les classes moyennes.
Mais son succès attire aussi des acteurs malintentionnés. Pour que la transition énergétique soit une réussite collective, il est essentiel de préserver l’intégrité du système, d’assurer la qualité des travaux réalisés et de protéger les consommateurs.
Source : BATIACTU
News #3 – Revalorisation salariale pour les enseignants contractuels des ENSA
Le 14 mars 2025 marque une étape décisive dans la reconnaissance du travail des enseignants contractuels des Écoles Nationales Supérieures d’Architecture (ENSA). La ministre de la Culture, Rachida Dati, a signé un accord inédit avec plusieurs organisations syndicales, visant à améliorer significativement les conditions salariales de ces professionnels longtemps délaissés.

Cet accord ne se limite pas aux ENSA : il concerne également les enseignants contractuels des écoles nationales supérieures d’art et de design (Ensart) ainsi que ceux des conservatoires nationaux supérieurs de musique et de danse (CNSMD) de Paris et Lyon.
Une revalorisation concrète et progressive
Concrètement, l’accord prévoit une augmentation du traitement indiciaire fondée sur l’ancienneté, avec à la clé de véritables perspectives de carrière. Pour les enseignants déjà en poste, un reclassement dans les nouvelles grilles est prévu. Ce reclassement s’accompagne de dispositifs permettant la prise en compte de l’ancienneté et une revalorisation immédiate des salaires.
✅ Chiffres clés :
- 741 enseignants contractuels concernés dans les ENSA
- +2 000 € en moyenne de gain annuel pour les enseignants contractuels
- +3 000 € en moyenne pour les maîtres de conférences invités
Un combat syndical de longue haleine
Cette avancée est le fruit de plusieurs années de revendications portées par les syndicats et collectifs du secteur. Dès 2020, le « Collectif pour des conditions dignes et égalitaires des enseignants contractuels en écoles d’architecture » dénonçait des écarts de traitement injustifiés. À titre d’exemple, certains enseignants à mi-temps, avec des diplômes allant de bac+5 à bac+8 et jusqu’à 34 ans d’ancienneté, étaient rémunérés à peine 745 € par mois, un chiffre bien en deçà des standards légaux.
Ce collectif mettait aussi en lumière un paradoxe inquiétant : 43 % des enseignants dans les écoles d’architecture sont contractuels, mais ils assurent 23 % des heures d’enseignement, tout en percevant des salaires bien inférieurs à ceux de leurs homologues titulaires.
Un enjeu national pour l’avenir de l’architecture
La question de la rémunération ne se limite pas au bien-être des enseignants. Elle touche également à la qualité de la formation dispensée dans les écoles d’architecture et, à terme, à l’avenir même de la profession.
En octobre 2024, la députée Christine Arrighi (Haute-Garonne) avait alerté le gouvernement sur la situation critique des ENSA. Elle rappelait notamment que la France figure parmi les derniers pays européens en nombre d’architectes par habitant. Les capacités d’accueil des écoles sont limitées, les locaux parfois vétustes, et les moyens humains insuffisants.
Source : BATIACTU
News #4 – Fraude sociale dans le BTP : un record pour 2024
En 2024, le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) a été au cœur d’un phénomène préoccupant : la fraude sociale y a atteint un niveau historique, avec plus de 1 milliard d’euros de redressements opérés par les services de contrôle. Ce chiffre représente plus de 60 % du total national, toutes branches confondues. Jamais une telle somme n’avait été identifiée dans ce secteur.

Des contrôles renforcés et des sanctions lourdes
Sur l’ensemble de l’année, ce sont 1,6 milliard d’euros qui ont été redressés au niveau national, dont 1,1 milliard en cotisations sociales non déclarées et 490 millions d’euros de sanctions. Ces résultats sont le fruit d’un renforcement significatif des contrôles. Plus de 34 000 actions ont été menées pour lutter contre le travail dissimulé, dont près de 7 000 contrôles ciblés dans les secteurs les plus exposés.
Outre le BTP, les services aux entreprises et le commerce ont également été concernés, mais dans des proportions bien moindres : 408 millions d’euros et 44 millions d’euros respectivement.
Le travail dissimulé, une plaie persistante dans le BTP
Le travail illégal, sous toutes ses formes, reste une problématique structurelle dans le bâtiment. Sous-traitance opaque, absence de déclarations sociales, faux statuts, détachements irréguliers de travailleurs étrangers : ces pratiques alimentent une concurrence déloyale et mettent en danger la protection sociale des salariés.
Les autorités ont réaffirmé leur volonté de durcir les contrôles et de poursuivre les sanctions. Un objectif ambitieux de 5,5 milliards d’euros de redressements est fixé pour la période 2023-2027.
Quelles conséquences pour les entreprises du BTP ?
Ces résultats envoient un signal fort à l’ensemble de la profession. Les entreprises vertueuses peuvent espérer un rétablissement d’une concurrence plus équitable, tandis que les contrevenants s’exposent à des risques financiers majeurs et à une atteinte à leur réputation.
Il est donc impératif pour les acteurs du secteur de renforcer leurs démarches de conformité, de maîtriser leur chaîne de sous-traitance et de respecter strictement la législation sociale en vigueur.